Tavelure de la poire (Venturia pyrina)
La tavelure du poirier est une maladie économiquement importante. La plupart des traitements fongicides en verger de poiriers visent à prévenir cette maladie. Si la progression devient incontrôlable, 50 à 100% des fruits peuvent devenir invendables.
Le champignon de la tavelure du poirier forme des ascospores tout comme la tavelure du pommier, mais peut aussi hiverner sur du bois de 1 à 3 ans. Ces chancres commencent à produire des conidiospores avant le débourrement et pendant tout l’été. Les taches de tavelure du poirier s’observent principalement sur la face inférieure des feuilles, en faible nombre, même lorsqu’un nombre élevé de fruits présente des symptômes.
En règle générale (sur la variété Conférence), les premières taches sur les fruits se trouvent dès la nouaison et résultent d’infections avant la floraison. La plupart de ces fruits tombent dans les semaines qui suivent. Les symptômes ultérieurs ne deviennent visibles que quelques semaines avant la récolte et ont tendance à augmenter pendant le stockage.
Dans les vergers de poiriers où aucune tache de tavelure sur les fruits n’a été observée l’année précédente, la lutte contre la tavelure est facile. Un programme de pulvérisation réduit est suffisant pour maintenir la maladie à un niveau minimal et indétectable. Nous supposons que dans ces situations, les ascospores sont la seule source d’inoculum. Dans ce cas, le modèle tavelure du pommier peut être suivi pour les infections primaires (ascospores), mais la date du biofix doit être fixée pour la pointe verte de la poire.
Dans les vergers de poiriers où les fruits présentaient des taches de tavelure après stockage au froid, une gestion efficace de la tavelure devient immédiatement plus difficile. Nous supposons que dans ces situations, l’inoculum est principalement constitué de conidies produites par des lésions sur le bois et les brindilles. Déjà au début de la saison de végétation, l’inoculum ascosporique est dépassé en nombre par les conidies de la tavelure du poirier.
Les producteurs estiment que la gestion de la tavelure du poirier est plus difficile dans les arbres et les vergers vigoureux. La réduction de la croissance des pousses grâce à du coupe racine ou à un allègement de la fertilisation, diminue l’incidence de la tavelure sur fruits dans les essais sur le terrain.
Le modèle
RIMpro propose deux modèles pour les infections des fruits par la tavelure du poirier. Il existe un modèle statique «de base» qui combine simplement la durée de l’humectation avec la température et indique des chances de germination faibles, moyennes ou élevées pour les spores, comme le font les tables de Mills pour la tavelure du pommier. Les calculs sont basés sur des données de recherche publiées par Spotts 1991, 2010, Villalta 2000.
Un modèle dynamique qui prend en compte la quantité de spores disponibles, leur projection à partir des chancres sur le bois, et la modulation des valeurs d’infection en fonction de la résistance ontogénétique des fruits.
Le graphique inférieur «spores sur bois» estime la production de conidiospores par les chancres de tavelure sur la base des travaux détaillés de Saccas en 1944. Les premières conidiospores sont produites avant la date de débourrement que vous avez définie. Les spores sont distribuées par les éclaboussures de pluie à partir des chancres et vers d’autres parties de l’arbre.
Le graphique du milieu «infection potentielle» indique en blanc les spores en germination. La ligne d’infection rouge simule le nombre de spores qui ont réussi à infecter la surface de la plante et détermine la gravité potentielle de l’infection
Le graphique supérieur «infection effective» prend en compte la sensibilité des fruits de la principale variété Conférence. Après la floraison, la sensibilité des fruits diminue progressivement. Nous avons constaté dans nos essais sur le terrain que les applications de fongicide sur Conference après la mi-juin ne contribuaient pas davantage au contrôle de la tavelure sur les fruits. C’est uniquement dans les vergers avec un inoculum très élevé, que des traitements ultérieurs peuvent ajouter un peu d’efficacité. La zone rose montre la sensibilité relative des fruits. Le risque d’infection des fruits dans le graphique supérieur est calculé à partir de la gravité potentielle telle que calculée dans le graphique du milieu x la sensibilité relative des fruits. Il en résulte que les infections potentielles calculées à partir de début juin sont estimées moins importantes à mesure que les fruits mûrissent.
L’utilisation du modèle pour la gestion de la tavelure
Le modèle est encore expérimental.
Le modèle contient toutes les informations publiques disponibles sur la tavelure du poirier et les résultats des essais menés par le groupe de travail néerlandais sur la tavelure du poirier 2010-2020.
Tester le modèle dans des conditions de terrain s’est avéré difficile en raison du fort effet de la pression de la maladie sur les résultats et de l’efficacité limitée des fongicides disponibles pour la production de poires biologiques.
À partir des résultats de terrain 2017-2020 obtenus dans des vergers de poiriers biologiques aux Pays-Bas et en Belgique, nous pouvons cependant conclure que :
- Dans les vergers de poiriers biologiques où, après stockage, moins de 5% des fruits présentaient des symptômes de tavelure, un programme curatif basé sur l’utilisation de soufre, de bicarbonate et de BSC, ciblant les infections indiquées par le modèle s’est révélé efficace.
- Dans les vergers de poiriers biologiques avec plus de 5% de fruits tavelés après le stockage, le programme curatif nécessitait un soutien par des applications préventives de cuivre à faible dose pour être raisonnablement efficace.
La clé d’une gestion efficace de la tavelure du poirier est un faible inoculum et une fin de la pousse fin juin. Avec les fongicides chimiques disponibles dans la production intégrée, le contrôle de la tavelure du poirier est rarement un problème. Dans ces conditions, nous pensons que le modèle est un bon guide pour les décisions concernant les applications de fongicides.
Pour la production biologique, avec des fongicides curatifs qui ont un une fenêtre d’intervention limitée, un timing précis, une dose appropriée et d’excellentes techniques de pulvérisation sont nécessaires.
Dans les vergers où la pression de la maladie est importante, que ce soit en PFI ou en AB, une lutte efficace est un défi. Les infections indiquées par le modèle seront toujours les moments clés de la lutte contre la maladie, mais en pratique, les applications de fongicides curatifs doivent être complétées par des traitements préventifs peu avant le début de la pluie. Dans ce cas de forte pression, les infections entre la mi-juin et juillet indiquées comme ayant une importance minime dans le graphique «Infection effective» doivent également être prises au sérieux.